mercredi 24 août 2011

Hannah Hoch



Hannah Hoch (née Hanna) est née le 1er novembre 1889 à Gotha et a grandi en Allemagne. Elle était l’aînée d'une famille de cinq enfants dans un milieu provincial et bourgeois. Son père est directeur d'une compagnie d'assurances, sa mère est peintre amateur. Obligée à quinze ans de quitter le lycée pour s'occuper de sa sœur cadette, elle ne reprend ses études que six ans plus tard en 1912, à l’âge de 22 ans, en s'inscrivant à l'université de Berlin puis à l'école d'Arts appliqués de Berlin où elle s'initie au dessin sur verre, à la calligraphie et à la broderie.
La Première Guerre Mondiale interrompt sa formation intellectuelle et picturale et en 1914 elle rentre à Gotha où elle  travaille pour la Croix Rouge
À partir de 1916, soutenue par sa famille, elle travaille à la fois pour un éditeur de journaux berlinois et pour le département de l'artisanat où elle dessine des motifs de tricot, de crochet et de broderie pour des magazines spécialisés. 
 C’est en 1919 que, brusquement, le peintre abandonna toute recherche artistique pour s’adonner à l’aventure dada.
Elle retourne à Berlin et s'inscrit au cours d’Emil Orlik, artiste du Jugendstil. Elle rencontre Raoul Hausmann (fondateur avec Huelsenbeck et les frères Herzfelde de la tendance dadaïste berlinoise)  avec qui elle s'installe, Kurt Schwitters lui suggère d'ajouter un "h" à la fin de son prénom pour la beauté du palindrome et Johannes Baader  la surnomme « Die Dadasophe » puisqu'elle est la compagne du "Der Dadasophe Hausmann".
Avec lui, elle expérimente le photomontage et le découpage/collage d'images à partir de cartes postales que les soldats envoient du front à leur famille.


Hannah Höch participa aux activités du groupe en collaborant à la revue Der Dada ainsi qu’à la publication Schall und Rauch
En 1920, lorsque le dadaïsme de Berlin était en plein essor, Hannah Höch fut la seule femme à participer activement à ces manifestations: percussionniste de couvercle en fer-blanc dans l'« Antisymphonie » donnée par Jefim Golyscheff, elle y  présenta également une série de reliefs et de poupées. Mais son univers tout particulier s’exprima surtout dans les collages. Elle voyagea avec Kurt Schwitters dans l’Europe entière pour diffuser les idées du mouvement. Hannah Höch fera partie aussi du Novembergruppe, jusqu’en 1931, année où les activités de ce mouvement s’interrompirent.




Au sein du dadaïsme allemand, l’œuvre de Hannah Höch occupe une place particulière. Ses collages appartiennent en effet à deux catégories distinctes. Une première, la moins importante, de tendance politique, voisine avec les expériences de Helmut Herzfelde (appelé aussi John Heartfield) et de Raoul Hausmann. La seconde est à la fois plus documentaire et plus onirique. Le peintre exécute de grands collages avec des photos d’autres dadaïstes, où se trouvent ainsi réunis tous les membres du groupe berlinois. L'une de ses préoccupations est la représentation de la "femme nouvelle", son identification sociale et personnelle dans la République de Weimar, et la dénonciation de la vision machiste et misogyne qui perdure dans la presse populaire. Elle fait de cette pratique un instrument de critique sociale et politique.



 
Malgré sa condition de femme éduquée bourgeoisement, Hannah Höch a su dépasser ses aptitudes aux « ouvrages de dame » conjuguées à son goût pour les arts décoratifs, dans des buts satiriques et politiques. Recyclant des motifs de tissus, des morceaux de linoléum colorés, des patrons de couture, de chutes de dentelles, elle conçoit des compositions abstraites d'une grande finesse : « Astronomie » ou « Lune Dorée » et d'un humour assuré : « L'Esquisse pour un monument d'une importante chemise à dentelle ».
Pour ses contemporains qui n'ont pas su voir au-delà du matériau utilisé, Hannah Höch ne faisait que des œuvres intimes typiquement féminines. Rare sont ceux qui ont compris la portée de la parodie et du détournement de la masculinité à coller de la dentelle sur des images de responsables politiques de la République de Weimar.


L’œuvre, un collage, intitulée Coupe faite avec un couteau de cuisine en 1919, est particulièrement significative de la démarche de l’artiste. Il s’agit d’une vaste surface (114 cm X 90 cm) où se trouvent disposés divers éléments photographiques issus de l’environnement urbain : gratte-ciel, maisons, foules, ou de la technologie : rouages, machines, outils, ainsi que des portraits d’hommes politiques et d’artistes. La mise en page de l’œuvre est très soignée, et les différentes parties, tout en s’échelonnant librement, se trouvent reliées par des relais plastiques et structuraux. D’autres travaux semblent plus orientés vers l’exploration onirique. 



Dans Danse, photomontage de 1919, dans La Mère collage de 1930  ou dans Les Poissons lunaires collage de 1956, les figures grotesques donnent une impression de dépaysement, et la juxtaposition d’éléments disparates rappelle certaines œuvres contemporaines de Max Ernst. Hannah Höch exécuta des collages plus " intimistes ", où elle semble bâtir une patiente autobiographie. Meine Haussprüche collage de 1922 et Schneiderblume collage de 1920 font partie de ces travaux extrêmement rigoureux et raffinés. 
Lorsque Dada prend fin, elle se rapproche du mouvement De Stijl aux Pays-Bas.
En 1926, elle s'installe à La Haye où elle partage sa vie avec l'écrivaine Til Brugman.
Elle meurt le 31 mai 1978 à Berlin.



 
L’œuvre de Hannah Höch, qui est à mi-chemin entre le dépaysement surréaliste et la violence destructive de Dada, est une des plus " constructives " du mouvement allemand. Elle témoigne de l’extraordinaire variété de solutions plastiques que le mouvement dada a inspirée.
« Je suis restée fidèle au photomontage et au collage. Jusqu'à ce jour, j'ai tenté d'exprimer, avec ces techniques, mes pensées, mes critiques, mes sarcasmes mais aussi le malheur et la beauté.»
De manière plus évidente, et donc plus lisible, que ses "collages en dentelle", les photomontages d'Hannah Höch expriment une volonté profondément moderne de rétablir le rapport homme/femme sur un mode égalitaire. Forte de ses convictions féministes et politiques, ridiculisant la morale bourgeoise et la traditionnelle division des sexes, Hannah Höch veut voir dans la "nouvelle femme" un instrument de libération et la source de renouvellement de la société.


Charles SALA (professeur d'histoire de l'art, Université de Paris-X Nanterre). « Hannah HÖCH », Encyclopaedia
Universalis
Address book of Hannah Höch, 1917-1978.
Cat in garden (Katze im Garten) ,1959
1975 -by Stefan Moses
Hannah Höch, Etrange beauté II, 1966, photomontage, Institut pour les relations étrangères à Stuttgart.


Hannah Höch et ses poupées, 1920, collection Galerie 1900-2000, Paris

Autoportrait, 1930.
Fridenfürst, 1919


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