jeudi 30 juin 2011

James Ensor


James Ensor est  né le 13 avril 1860 à Ostende (ville néerlandophone de Belgique, située en Région flamande dans la province de Flandre-Occidentale).  En 1883, il est l’un des membres fondateurs du groupe bruxellois d'avant-garde "Les Vingt". Tous les artistes se heurtent à l'incompréhension de leurs contemporains, mais le belge James Ensor, en ressentit une telle humiliation qu'il projeta sa colère sur la toile, pour se venger, en donnant naissance à d'inquiétantes mascarades, qui continuent aujourd'hui de fasciner...

James Ensor est né d'un père anglais anticonformiste, ingénieur raté, qui sombrera dans l’alcoolisme, et d'une mère ostendaise qui n'encourage guère sa vocation artistique. Commentant sa naissance lors d'un banquet offert en son honneur, il s'exprime en ces termes : « Je suis né à Ostende, le 13 avril 1860, un vendredi, jour de Vénus. Eh bien ! Chers amis, Vénus, dès l'aube de ma naissance, vint à moi souriante et nous nous regardâmes longuement dans les yeux. Ah! Les beaux yeux pers et verts, les longs cheveux couleur de sable. Vénus était blonde et belle, toute barbouillée d'écume, elle fleurait bon la mer salée. Bien vite je la peignis, car elle mordait mes pinceaux, bouffait mes couleurs, convoitait mes coquilles peintes, elle courait sur mes nacres, s'oubliait dans mes conques, salivait sur mes brosses. »
Le jeune Ensor vit à Ostende au milieu des coquillages, des chinoiseries, des verroteries, des masques et des animaux empaillés qui peuplent la boutique familiale. Les heures passées dans ce décor coloré et fantastique, influencent son inspiration. Ensor  leur confère un sens symbolique qui conduit à une méditation sur la mascarade de la vie face à la mort. Cette alliance de dérision et de tragédie fera de lui un précurseur de l'expressionnisme.
A treize ans, Ensor suit des cours de dessin chez deux artistes locaux: Edouard Dubar  et Michel Van Cuyck. Dans la biographie du catalogue raisonné James Ensor, Xavier Tricot indique qu'il montre davantage d'intérêt pour le dessin que pour les cours donnés par ses professeurs du collège de Notre-Dame.
En 1877, il s'inscrit à l'Académie des Beaux-Arts de Bruxelles, dirigée par Jean-François Portaels où il se lie d'amitié avec Fernand Khnopff et Willy Finch et fait la connaissance de la famille Rousseau qui l'introduit dans les milieux artistiques et intellectuels de la capitale. Ses professeurs sont Joseph Stallaert et Joseph van Severdonck. Mais il s'insurge contre l'académisme «Je sors et sans façon de cette boîte à myopes» (il quitte l'Académie en 1880) et décide de retourner s'installer chez sa mère où la lumière de la cité balnéaire lui inspire des pâleurs secrètes. Ensor sculpte cette  lumière et est fasciné par le pouvoir de recréer les choses ou de les vider de leur contenu familier : « La lumière déforme le contour. Je vis là-dedans un monde énorme que je pouvais explorer, une nouvelle manière de voir que je pouvais représenter. »
C'est entre 1887 et 1893 qu'il peint ses plus beaux tableaux : la gamme chromatique prend feu au milieu des nacres translucides des ciels et des marines. Contemporaine des Van Gogh et des toiles d'Edvard Munch, son œuvre contient les futures révolutions du fauvisme au mouvement Cobra .


Il va donc mettre en évidence les aspects grotesques des choses, rehaussés de manière surréelle, et s'orienter vers une vision du monde radicale, sarcastique et insolente. Comme chez Pieter Bruegel l'Ancien ou Jérôme Bosch, l'inanimé respire et crie. Ses obsessions et ses peurs jouent un rôle manifeste dans les traits menaçants qu'il attribue aux objets utilitaires, aux revenants et aux masques. Ces derniers, à partir des années 1880, dominent son inspiration et renvoient au carnaval, ce « monde à l'envers », anarchique où les rapports sociaux sont démontrés par l'absurde. La foule considérée comme une menace, un cauchemar, sera le thème de nombreuses toiles. Il entretient avec elle des rapports ambivalents: solidarité envers les revendications des défilés contre l'Église et le roi mais aussi, crainte bourgeoise d'un homme retiré du monde.

Dans la maison familiale où, célibataire convaincu, il vivra jusqu'en 1917, Ensor s'installe un cabinet dans les combles et commence à peindre des portraits réalistes ou des paysages inspirés par l'impressionnisme. A cette époque, il écrit : « Mes concitoyens, d'éminence molluqueuse, m'accablent. On m'injurie, on m'insulte : je suis fou, je suis sot, je suis méchant, mauvais... ». Ce sont finalement des écrivains comme Maurice Maeterlinck et Émile Verhaeren qui vont comprendre son œuvre qui ne fut appréciée à sa juste valeur qu’après la Première Guerre mondiale.
Il entame alors une de ses périodes les plus créatrices.
En 1883, Octave Maus fonde le cercle artistique d'avant-garde «Les XX » et Ensor peint son premier tableau de masques, et un autoportrait auquel il ajoutera plus tard le « Chapeau fleuri ». En 1888, l'année de sa rencontre avec Augusta Boogaerts qu'il surnomme la Sirène et à qui il écrira 250 missives platoniques, il peint son Entrée du Christ à Bruxelles sa toile maîtresse, (il n'a que vingt huit ans) dans laquelle toute l'originalité provocante et tout l'art d'Ensor se concentre. Cette œuvre est refusée au Salon de XX et il est question de l'exclure du Cercle dont il est pourtant l'un des membres fondateurs. Le groupe se sépare quatre ans après pour se récréer sous le nom de La Libre Esthétique. L'année suivante, toutes ses toiles sont rejetées du salon de Bruxelles et il est mis à l'écart du Cercle des Vingt. Ulcéré, Ensor bascule dans la déraison. Désormais, seul contre tous, il couvre et balafre ses toiles de couleurs rougeoyantes symbolisant son exaspération.


Artiste pluraliste, il l'est également dans son style et ses techniques: toile, bois, papier, carton, couteau à palette, pinceau fin ou spatule... : « Chaque œuvre devrait présenter un procédé nouveau », écrit-il à André de Ridder. Il s'est aussi lancé dans la gravure : « Je veux survivre, et je songe aux cuivres solides, aux encres inaltéraDans un but purement alimentaire, il édite des eaux-fortes, les fameux « biftecks d'Ensor », œuvres purement commerciales mais qui ont fait alors la fierté des marchands de souvenirs. Il réalise aussi des caricatures, laissant libre cours à sa verve gouailleuse, avec un trait racé, canaille et pourfendeur à la manière de Bruegel et de Bosch. Ses scènes de baigneurs fesses à l'air dans des postures hilarantes sont des chefs d'œuvres du genre. Par sa prédilection pour les personnages masqués, les squelettes, qui, dans ses tableaux, grouillent dans une atmosphère de carnaval, Ensor est le père d'un monde imaginaire et fantastique qui annonce le surréalisme.
Des pantins affublés de masques grotesques, ressemblant à ceux dont sa grand-mère faisait commerce, envahiront désormais ses tableaux. Ils seront bientôt rejoints par des squelettes, des gnomes et des diables. Ensor vise les critiques qui vilipendent ses toiles autant que la bêtise de ses contemporains, infâmes poissardes, médecins douteux ou stupides vacanciers d'Ostende. Il illustre de cette façon l'absurdité du monde, la vanité de l'existence. Même si ce goût du travestissement macabre s'inscrit dans la tradition flamande, il déconcerte le public. Incompris, meurtri, Ensor se représente sous les traits du Christ martyrisé.
A33 ans, Ensor est déjà un homme du passé. Le pointillisme et le symbolisme semblent l'emporter.
Ensor doit attendre le début du siècle suivant, alors qu'il a donné le meilleur, pour assister à la reconnaissance de son œuvre, expositions internationales visite royale, anoblissement (il est fait baron), légion d'honneur. Il est désormais surnommé le « prince des peintres », mais il a une réaction inattendue face à cette reconnaissance trop longtemps attendue et trop tard venue à son goût : il abandonne la peinture et consacre les dernières années de sa vie exclusivement à la musique.
James Ensor était un mélomane averti faisant intervenir couramment des éléments musicaux dans ses œuvres picturales. Alors qu’il ne lit ni n’écrit la musique, le peintre laisse à la postérité une série de compositions dans le style de la musique de salon à défaut de laisser traces des improvisations originales au piano et à l’harmonium qui ravirent et surprirent ses contemporains.

 
En 1942, la radio annonce par erreur son décès. Il revêt alors un costume de deuil et va se recueillir sur un monument, érigé à sa gloire quelques années plus tôt. Ensor retrouvait là son ironie d'antan.
Il décède le 19 novembre 1949 à Ostende,  à l'âge de 89 ans, laissant une œuvre dont se réclameront des artistes tels qu'Alechinsky, Nolde, Grosz ou Kubin et est inhumé quatre jours plus tard dans le cimetière de  Mariakerke, près d'Ostende.
Si la vie privée d'Ensor reste mal connue, c'est parce que l'artiste l'a désiré ainsi. Le peintre s'est construit une existence de silences, de mensonges et de mystifications mais également une existence de beauté, de vérité et de veine poétique.

King Pest (1880), after Edgar Allan Poe 





lundi 27 juin 2011

Michel Macréau


C’est l’un des précurseurs de l’art brut, de la figuration libre dans la veine de Basquiat, de Combas qu’il a  précédés et influencés. Un peintre qui a connu un temps le succès dans les années 60 puis est vite tombé dans l’oubli. Un artiste au destin tragique, mort dans la misère.
Michel Macréau a peint au pinceau, à la paille, sur différents supports : toile, contreplaqué, bois, meubles, papier journal, draps, sacs postaux, agglo, et murs de la ville bien avant les tendances du tag et des graffitis.
Proche de certaines préoccupations CoBrA, précurseur du graffiti urbain, le travail de Michel Macréau  inscrit la peinture dans le champ de l'écriture et du dessin, s'affirme par la complexité d'une figuration apparemment malhabile, par la qualité picturale des lignes sobres jouant avec l'espace du tableau.  Il dessine le corps et les visages. 


 
Le corps humain dénudé, sans peau, dont il dresse une cartographie métaphorique, où les organes et les orifices sont exagérément indiqués, parfois jusqu’au malaise. Les symboles sont rudimentaires mais efficaces. Il s’inscrit dès lors dans la franche lignée des peintures-écritures, où le dessin est roi. Une peinture graphique quelquefois brutale, fondamentalement tendre, sous-tendue par une angoisse presque palpable trouvant son origine dans des mythologies personnelles  les plus obsédantes. L'œuvre de Michel Macréau est imprégnée de douleur et d'étrangeté. La trentaine de portraits réunis font preuve d'un mal-être voisinant avec la folie. Des visages composites aux yeux asymétriques, chargés de symboles tribaux et de croix abordant les thèmes de l'enfance et de la religion.
Michel Macréau a connu le succès durant 10 années, seulement, lui qui a toujours refusé toute compromission dans son art, s’est vite vu éclipsé par des peintres comme Basquiat.




 Il va produire une œuvre riche de plus de 2 400 peintures ou dessins, transposition primitive et généreuse de son « Plan de paix », rédigé en quatre manifestes sincères et utopistes. Celui que l’on classe volontiers dans l’art brut est certes original, mais à la façon du mysticisme catalan médiéval. Ses illuminations, art d’instinct et d’invention, peignent et dépeignent sans relâche sa société universelle où se côtoient rois et reines, papes, missionnaires et apôtres, hommes politiques, travailleurs et patrons, à travers des harmonies dynamiques de couleurs qui se révèlent dans leur tonalité affective.

 Michel Macréau est né le 21 juillet 1935 à Paris. Fils unique, élevé par une mère représentante en fourrures et un père routier toujours absent, Michel Macréau est placé de famille en famille et connaît une enfance instable. Son adolescence apparaît ensuite comme une longue dérive. Un jour, dans une librairie, il tombe en arrêt devant deux livres d’art, l’un sur Matisse l’autre sur Picasso. Ne pouvant en acheter qu’un seul, il choisit Matisse  et, de facto, décide de devenir peintre.
 En 1953, il s’inscrit au lycée de Sèvres, dans la section artistique et collabore à la réalisation de cartons de tapisseries de Le Corbusier sous la direction de Pierre Baudouin. Puis il fréquente l’Académie de la Grande Chaumière et un cours chez un fresquiste, Lesbounit à Montparnasse. Il se marie avec le sculpteur Claudie Pessey, avec laquelle il aura trois enfants, Violaine, Ludovic et Alice.

 En 1959, Macréau s'installe avec des amis du cours de Lesbounit, en squatteur, dans le château abandonné de La Barrerie, à Villiers-le-Bacles, dans la vallée de Chevreuse. Il y fera sa première exposition de groupe dans le jardin.
Macréau rencontre Raymond Cordier et Cérès Franco en 1960. Celui-ci le présentera à la Biennale d’Art de Sao Paolo en 1963.
 1962 est l'année du succès pour sa première exposition personnelle à la Galerie Raymond Cordier. Georges Pompidou lui achète deux toiles qui seront ensuite installées au fort de Briançon lors de sa présidence.
 En 1964, le couple Macréau emménage près de Bourges dans une maison isolée, précaire et vétuste. L'artiste se consacre pleinement à la peinture, ses expositions se multiplient et rencontrent du succès, en France et à l'étranger (Paris, Rio de Janeiro, Espagne, Hollande...). Son talent séduit de nombreux collectionneurs. 

De 1972 à 1979, Macréau a des doutes sur sa démarche artistique et produit peu. L'artiste est en pleine dépression.
Il se retrouve seul en 1975 et se réfugie à l'hôpital pour de longs séjours qui se renouvellent jusqu'en 1981.
 Vers 1979, Macréau reprend progressivement goût à la vie et à la création.
 Retour dans sa maison du Berry en 1983 et joie de retrouver la campagne qui enrichira son langage pictural et contribuera à son épanouissement. Début d'une nouvelle période euphorique, retour du succès, Macréau va créer beaucoup et réalisera des nombreuses expositions personnelles et collectives, jusqu'à sa mort, en  1995, à l'âge de soixante ans.

http://www.evene.fr/culture/agenda/michel-macreau-27386.php
« …Des squelettes effrayés, des mères omnipotentes et des anges sanguinolents sous des croix rouges intrigantes, le tout dans une effusion, à la peinture ou au crayon, de seins, d’os et de cordons… Voilà Michel Macréau l’« hors cadre »…
…Il suffit de jeter un coup d’œil sur ses toiles pour le vérifier : on y retrouve les femmes « picassiennes » désarticulées et leurs clins d’œil nargueurs. On y voit aussi des mères qui enfantent dans la douleur et des couples rattachés seulement par le bas du corps, ce qui, peut être, explique les amantes qui pleurent comme des boîtes à musiques déglinguées… Les corps de Macréau sont sans peau, personnages de Dickens fragmentés (cf l’analyse de Siri Hustvedt) prolongement direct du monde sensible qui, naviguent (volent ou plutôt tombent) sans cesse entre l’enfer juste sous nos pieds (cf C’est loin d’ici, 1963) et un paradis à peine plus réjouissant aux vierges tentaculaires, aux anges blessés et aux Marie-Madeleine déshumanisées. Michel Macréau, était important dans les années 90, Basquiat l’avait présenté à la galerie Prazan Fitoussi à l’occasion de la manifestation « Vingt ans après ». Aujourd’hui, le créateur est presque oublié, la belle exposition qui lui est consacrée à la Halle Saint Pierre ne dérange pas les foules. Et pourtant, avec ses têtes naïves errants dans des cimetières grinçants, sa spontanéité et sa façon de nous montrer, par l’écriture automatique, la peinture en train de se faire, Michel Macréau est effectivement un des précurseurs de la Figuration Libre (en plus d’être, et c’est lié, celui du graffiti)… Comme si, se foutant une dernière fois des cases et des institutions, préférant le cimetière des anges déchus et la pastille « Art Brut » aux étoiles de ses frères et aux signatures de Ben sur les agendas des élèves, le vagabond s’était retiré du cadre à pas feutrés après avoir pris soin d’insuffler ses idées. » 

vendredi 24 juin 2011

Pavel Filonov


Pavel Nikolayevich Filonov, dit Pavel Filonov, poète, théoricien de l'art et peintre de l'avant-garde russe est né à Moscou le 8 janvier 1883.
En 1897, il s'installe à Saint- Pétersbourg où il prend des leçons d'art.
Pavel Filonov fréquente l'Ecole de dessin de la Société d’encouragement des arts à Saint- Pétersbourg de 1898 à 1903, puis l'atelier de Liev Dimitriev-Kavkazski à l’Académie des Beaux-Arts de Moscou de 1908 à 1909. Il en est renvoyé en 1910.En 1910-1914, il prend part au groupe des arts Soyouz Molodyozhi créé par les artistes Elena Guro et Mikhail Matyushin.
Filonov est membre de l’Union de la jeunesse et participe aux manifestations avant-gardistes telles que "La queue d’âne" à Moscou en 1912. La même année, il écrit l'article "Le canon et la loi" dans lequel il formule les principes du réalisme analytique, également appelé « anti-cubisme ». D'après Filonov, le cubisme représente les objets en utilisant des éléments géométriques de leur surface, mais les réalistes analytiques devraient représenter les objets en utilisant des éléments de leur âme intérieure. 
En 1913, il dessine des décors pour la pièce "Vladimir Maïakovski, tragédie". Il conçoit la méthode de l’art analytique et publie "Le Manifeste des tableaux inachevés" ainsi que la "Déclaration d’éclosion universelle". 
À l'automne de 1916, il s'enrôle pour le service militaire dans la Première Guerre mondiale. Il participe activement à la Révolution russe de 1917 et sert comme président du Comité de guerre révolutionnaire de la région Dunay.
Pavel Filonov participe en 1919 à la première Exposition nationale d’art à Pétrograd puis à l’Exposition de tableaux d’artistes de toutes les tendances, à l'Hermitage.
En 1923, il devient professeur de "Saint-Pétersbourg Académie des Arts" et membre de "l'Institut de Culture artistique" (INKhUK). Il organise une grande école des arts de Masters of Analytical Réalisme (plus de soixante-dix artistes). Leur travail a influencé le suprématisme et l'expressionnisme.
Il fonde en 1925 le groupe des "Maîtres de l’art analytique" ou "Ecole de Filonov".


Mother 1916

Son exposition individuelle programmée en 1929-1930 au Musée russe de Léningrad est annulée, mais le catalogue est publié. Filonov participe à l’exposition des "Peintres d’URSS des quinze dernières années", présentée à Léningrad en 1932 et à Moscou en 1933. Il illustre l’épopée finlandaise du "Kalevala".
A partir de 1932, Filonov est littéralement affamé mais a toujours refusé de vendre ses œuvres à des collectionneurs privés. Il voulait donner toutes ses œuvres au Musée de Russie comme un don, de manière à créer un musée de réalisme analytique.
Il est mort de faim le 3 Décembre 1941, pendant le siège nazi de Leningrad.
Pavel  Filonov a continué à appliquer les principes de l’art analytique jusqu’à la fin de ses jours.
 La plupart des œuvres  Filonov ont été sauvées par sa sœur Yevdokiya Glebova Nikolaïevna qui a stocké les peintures dans les archives du Musée russe.
En 1967, une exposition des travaux de Filonov a été autorisée. En 1988, son travail a été admis dans le Musée russe. En 1989 et 1990, la première exposition internationale du travail de Filonov a eu lieu à Paris.

Self Portrait, 1911

mercredi 22 juin 2011

Emile Josome Hodinos

Emile Joseph Hodinos est né en 1853 à Paris, d’une famille aisée de boulangers, qui lui permit d’apprendre le métier de graveur à 16 ans, chez Tasset, graveur de médailles réputé et il suit des cours à l’École de dessin, rue de l’École-de-Médecine à Paris.  De 1873 à 1874, il fait son service militaire, puis passe deux ans à l’École des Beaux-arts. En 1876, à 23 ans, il est hospitalisé pour “excitation maniaque” à Ville-Evrard, un hôpital réservé aux malades payants. C’est là qu’il prend le pseudonyme d’Emile Josome Hodinos. Il restera interné toute sa vie sans qu’on connaisse vraiment aujourd’hui le diagnostic de sa maladie. Il semblerait qu’Hodinos n'ait commencé son œuvre que dix ans après son internement et créé une œuvre considérable: plusieurs milliers de dessins à l’encre et à la mine de plomb, dont la plupart ont disparu. Les outils tranchants de graveur lui ayant été retirés, il dessine au crayon et à l’encre des médailles composées de figures à l’antique, de profils, de textes. Ses dessins sont des copies de médailles avec toutes leurs caractéristiques : images, exergues, devises, ornementations. L’ensemble constitue une véritable encyclopédie: inventaire des vices et des vertus, description de l’anatomie humaine, des attitudes, des vêtements ou des objets domestiques, formant une étrange hiérarchie qui représente sans doute pour lui l’ordre et la vérité d’un autre monde. 

 L’image d’une femme, souvent nue ou vêtue d’un voile transparent, composée, ou plutôt décomposée, coupée et vidée (pieds, jambes, genoux), revient souvent dans ses tableaux.  Il inscrit généralement sous sa signature les caractéristiques de son métier : mouleur, modeleur, compositeur, dessinateur, graveur. Dans ses compositions les plus abouties, les médaillons s’inscrivent dans une architecture de linteaux, de bandeaux et de piédouches « gravés ». Hodinos remplit tous les espaces vacants de mots et de phrases qui expliquent les motifs représentés et donnent également de nombreux éléments biographiques. Parallèlement à son activité de dessinateur, il entreprend la rédaction d’une Histoire générale des États européens de 1453 à 1789 et d’un dictionnaire politique. Son œuvre est une de celles qui, parmi les œuvres psychopathologiques, illustrent on ne peut mieux la métamorphose d’un métier due à l'enfermement. 




Après sept années d’apprentissage, brusquement privé de ses outils qui représentaient un danger aux yeux de l’institution, Hodinos, fort de son métier de graveur, affranchi des obligations sociales, va entreprendre, au crayon et à la plume, une œuvre qui se situe à la croisée des connaissances techniques et de cette voie qui donne accès à une aventure toute personnelle. On retient généralement de l’œuvre de Josome Hodinos son dessin, consistant en des projets de médailles soignés et aboutis. Petits formats, recto-verso la plupart du temps, ces figures aux variations inépuisables témoignent d'une technique que le délire conduit dans des chemins étranges. La maîtrise de son trait masque la particularité de ses compositions où s'égrènent la litanie des mots ressassés par les condamnés à la réclusion. C’est seulement dans un second temps que l’on s’attarde à l’écriture qui envahit l’œuvre entière, en est le contrepoint, en révèle le sens caché. 


Tout au long de chapelets de descriptions, de phrases lapidaires ou encore de textes explicatifs, Hodinos nous livre tout de sa vie, de son enfermement estimé à une vingtaine d’années : enfance, engagement politique, points de vue sur l’art, notes sur le travail de graveur, attrait de la femme allié à celui de la république, sévices subis à l’asile, tumultes en tout genre, rien ne manque à cette longue énumération savamment mise en page.  Par un renvoi continu des médailles aux tablettes d’écritures et des tablettes aux médailles, Hodinos use d’une formule sobre, fusionnelle, faite de sévérité et d’audace, qui rend l’œuvre toujours plus fascinante au fur et à mesure qu’on la découvre. Emile Josome Hodinos est décédé en 1905 à Ville-Hévrard.

lundi 20 juin 2011

Pierre Alechinsky



Pierre Alechinsky est né le 19 octobre 1927 à Bruxelles. Peintre et graveur belge, il réunit dans son œuvre expressionnisme  et surréalisme.
"A la pointe du pinceau. Il m'arrive (je vis pour ces moment-là) d'inventer un trait. Douceur, partage : reconnaître un trait ! Depuis des heures, à ma table, dans mon taillis, des heures sous l'effet d'une accumulation." Pierre Alechinsky.
Le père de Pierre Alechinsky est un juif russe et sa mère est wallonne. Tous deux sont médecins. Dans les années 1930, Alechinsky étudie à l'école Decroly à Bruxelles où il est un étudiant modéré. On oblige l’enfant gaucher à écrire de la main droite. La gauche, sa meilleure main, les éducateurs la lui laisseront pour les travaux « de moindre importance » : le dessin...
De  1944 à 1948, il étudie l'illustration du livre, et passionné, il illustrera poèmes et textes (Cioran, Butor, Yves Bonnefoy, André Frénaud, Tardieu, etc.). Il étudie également la typographie, les techniques de l'imprimerie, la gravure avec Stanley William Hayter, et la photographie à  l'Ecole nationale supérieure d'Architecture et des Arts visuels de La Cambre à Bruxelles. C'est pendant cette période qu'il découvre l'œuvre d'Henri Michaux, de Jean Dubuffet  et des surréalistes . Il rencontre et se lie d'amitié avec le critique d'art Jacques Putman , qui consacrera de nombreux écrits à son œuvre. Il commence à peindre en 1947 et fait alors partie du groupe Jeune peinture belge, qui réunit notamment Louis Van Lint, Jan Cox et Marc Mendelson.
Pierre Alechinsky devient très rapidement l'un des acteurs majeurs du monde artistique belge de l'après-guerre. Il fonde avec Olivier Strebelle  et Michel Olyff dans une maison communautaire, les Ateliers du Marais. Après sa rencontre avec le poète Christian Dotremont , l'un des fondateurs du groupe  CoBrA (mouvement créé en 1948, regroupant des artistes issus de Copenhague, Bruxelles et Amsterdam, qui préconise un retour à un art plus provocant, agressif et audacieux), et avec lequel il réalise des "dessins-mots". Il adhère en 1949 à ce mouvement d'avant-garde artistique, rejoignant Karel Appel, Benjamin Constant, Jan Nieuwenhuys et Asger Jorn. Il participe aussitôt à la « Première exposition internationale de CoBrA » au  Stedelijk.
Pendant la brève existence du groupe, il s'y implique très fortement, organisant des expositions, comme la « Deuxième exposition internationale d'art expérimental CoBrA » au palais des beaux-arts de Bruxelles (1951), et contribuant à la réalisation de la revue « CoBrA ». Le rôle capital que joue pour lui ce mouvement  tient autant aux personnes qu'aux idées défendues : spontanéité sans frein dans l'art, d'où rejet de l'abstraction pure et du « réalisme socialiste », refus de la spécialisation.
Après la dissolution du groupe CoBrA, dont il perpétuera l'esprit (« CoBrA, c'est mon école », a-t-il pu dire), Pierre Alechinsky s'installe à Paris, où il va côtoyer les surréalistes. Il va compléter sa formation de graveur et s'initier à de nouvelles techniques à l'Atelier 17, dirigé par Stanley Hayter. 
 
C'est l'époque, à partir de 1952, où il se lie d'amitié avec Alberto Giacometti, Bram van Velde, victor Brauneret où il commence une correspondance régulière avec le calligraphe japonais Shiryu Morita  de Kyōto.
En 1954 , il fait la connaissance du peintre chinois Wallace Ting , qui aura une grande influence dans l'évolution de son œuvre. Il abandonne progressivement l'huile pour des matériaux plus rapides et plus souples comme l'encre, qui lui permet de donner libre cours à un style fluide et sensible. Fasciné par la calligraphie orientale, dont la spontanéité l'attire, il effectue plusieurs voyages en Extrême-Orient et tourne à Kyōto un film documentaire sur cet art traditionnel japonais qu’est la calligraphie japonaise.
Même si  La nuit (1952) contient déjà cette inspiration de l'Extrême-Orient par la rencontre entre signe et écriture hors du champ de la couleur, le film Calligraphie japonaise, monté en 1958, témoigne de l'impact de cette découverte sur sa propre technique. Christian Dotremont en a écrit le commentaire et André Souris la musique.
Alechinsky présente, cette même année, sa première exposition personnelle à la galerie Nina Dausset, à Paris. Sa première grande exposition est organisée en 1955  au Palais des beaux-arts de Bruxelles.

En 1958 , c'est l'institute of Comtemporary Arts de Londres qui accueille ses œuvres (Alechinsky : encres). En 1960 , lors de la XXXBiennale de Venise, il expose au Pavillon belge.
Il s'intéresse également à l'architecture.
En 1963, Pierre Alechinsky installe un nouvel atelier à Bougival.
 En 1964, il invite Alberto Gironella à travailler dans son atelier à Paris. C'est aussi l'époque des premiers travaux lithographiques avec Peter Bramsen.
Soutenu par la Galerie de France , il effectue, à partir des années 1960 , de fréquents séjours à New-York, où il découvre en 1965  une technique qui lui conviendra bien, la peinture acrylique, à laquelle l'initie Wallace Ting , ainsi que de l'encre, différents types de papier comme des factures, et se laisse influencer par la technique de l'action painting. Cette même année, il crée son œuvre la plus célèbre Central Park, avec laquelle il inaugure la peinture « à remarques marginales », inspirée de la bande dessinée, où l'image centrale est entourée, sur les quatre côtés, d'une série de vignettes destinées à compléter le sens du tableau. L'interaction entre les deux zones est à la fois énigmatique et fascinante.
Toujours en 1965, André Breton , un an avant sa mort, invite Pierre Alechinsky à participer à la Xe Exposition internationale du Surréalisme, « L'Écart Absolu ».
Dans les années 1980, il devient pendant quatre ans professeur d'arts plastiques à l'Ecole Nationale Supérieure des Beaux Arts. Egalement écrivain, Pierre Alechinsky publie de nombreux livres dont « Titres et pains perdus », « Baluchon et ricochets », et en 2004 « Des deux mains  ».
Il illustre le « Traité des excitants modernes  » d Honoré de Balzac en 1989 . Le livre, accompagné d'une postface de Michel Butor r est publié par Yves Rivière.
En 1998 La Galerie nationale du Jeu de Paume, à Paris lui consacre une exposition.
En 2004, nouvelle exposition au Centre national d'art et de culture Georges-Pompidou, Paris
En avril 2006, il est fait chevalier de la Légion d'honneur en France, dans Trou (revue d'art) no 16, paraît le travail  « Main courante » qu'il a créé spécialement pour cette revue et dont l'édition de tête contient une eau-forte intitulée « Temps passé » tirée sur des feuilles d'un ancien registre des douanes françaises.
De décembre 2007 à mars 2008, à l'occasion des quatre-vingts ans d'Alechinsky, les Musées royaux des beaux-arts de Belgique de Bruxelles lui rendent hommage à travers
une exposition rétrospective de l'ensemble de la carrière de l'artiste. Il vit et travaille à Bougival.


http://fr.wikipedia.org/wiki/Pierre_Alechinsky 
http://www.evene.fr/celebre/biographie/pierre-alechinsky-16713.php 
http://www.moreeuw.com/histoire-art/pierre-alechinsky.htm 

Pierre Alechinsky dans son studio, Bougival, 2004 -par Martine Franck 
Pierre Alechinsky, Sous le feu, 1967
Pierre Alechinsky. The Complex of the Sphinx. 1967
 
Pierre Alechinsky, Something of a World 1952
Pierre Alechinsky dans son atelier de Bougival, le 20 novembre 1985 par Francis Apesteguy
Pierre Alechinsky, Sans la Coquille, 1978. Acryl auf Papier und Leinwand,
Bouclier urbain


Pierre Alechinsky, [no title] 1975-6
http://www.tate.org.uk/art/artworks